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Bioénergie forestière

La bioénergie forestière est-elle bénéfique pour l’environnement?

À l’heure où les nations, l’industrie et les collectivités cherchent des moyens de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) pour lutter contre les changements climatiques, le recours à la biomasse forestière pour produire de la bioénergie et ainsi compenser l’utilisation de combustibles fossiles suscite de plus en plus d’intérêt. Par ailleurs, les pressions s’intensifient pour réduire les coupes et protéger les réservoirs de carbone que constituent les terres forestières, également dans le but de lutter contre les changements climatiques. Le présent document résume ce que nous savons et ce que nous ignorons au sujet de la bioénergie forestière. Il expose aussi certains des éléments complexes dont il faut tenir compte pour déterminer s’il est approprié d’utiliser de la biomasse ligneuse pour produire de la bioénergie.

Qu’est-ce que la bioénergie forestière?

La biomasse forestière est constituée de toutes les parties de l’arbre : le tronc, l’écorce, les branches, les aiguilles ou les feuilles et même les racines. Il est possible de convertir cette biomasse en biocombustibles solides, liquides ou gazeux que l’on peut brûler pour produire de l’énergie, ou utiliser comme combustibles de remplacement pour le transport ou les procédés industriels. Les arbres sont utiles sur le plan énergétique : ils convertissent l’énergie du soleil en biomasse grâce à la photosynthèse, un processus qui absorbe du dioxyde de carbone de l’atmosphère.

La plus grande partie de la biomasse forestière utilisée pour produire de la bioénergie au Canada provient de déchets ou de résidus de procédés de fabrication. La bioénergie forestière représente une part importante de l’énergie utilisée dans le secteur des pâtes et papiers (58 % en 2007), surtout parce qu’il est avantageux, sur le plan économique, de convertir en énergie ce qui constituerait autrement un déchet devant être enfoui ou incinéré. Diverses technologies permettent de convertir la biomasse en énergie. Les producteurs de pâtes et papiers produisent ainsi de l’énergie en brûlant le déchet liquide (appelé liqueur noire) issu du procédé de désintégration dans une chaudière de récupération qui permet également le recyclage de substances chimiques. Les producteurs de pâtes et papiers et de bois d’oeuvre brûlent aussi des déchets ligneux (surtout de l’écorce) : la chaleur et parfois la vapeur obtenues permettent d’actionner des turbines et de produire de l’électricité. Toutefois, on s’intéresse de plus en plus à produire de la bioénergie à partir de l’utilisation de sous-produits de biomasse se trouvant sur des sites de coupe ou des sites perturbés, qu’il s’agisse de branches, d’arbres de faible valeur, de résidus laissés au sol après des coupes, des incendies ou des infestations d’insectes, ou de résidus d’exploitation empilés en bordure de route. La culture ou la coupe d’arbres destinés à la production de bioénergie suscite également un intérêt croissant.

Pourquoi s’intéresse‑t‑on à la bioénergie forestière?

Compte tenu de la fluctuation des prix de l’énergie et des préoccupations grandissantes concernant les changements climatiques, les entreprises et les gouvernements considèrent de plus en plus la bioénergie pour assurer la sécurité énergétique, et comme solution de remplacement économique et écologique aux combustibles fossiles. La récente baisse de prix des produits forestiers et les difficultés financières éprouvées par ce secteur ont aussi stimulé l’utilisation de biomasse forestière pour la production d’une gamme de bioproduits, dont la bioénergie, qui viennent s’ajouter aux produits forestiers classiques ou les remplacer. La transition vers une bioéconomie s’accompagne d’un intérêt accru pour les bioproduits à valeur élevée susceptibles d’améliorer le résultat net, comme les produits biochimiques et les biomatériaux pouvant remplacer des produits similaires fabriqués à l’aide de combustibles fossiles et qui sont souvent produits en même temps que la bioénergie. Il est également possible d’augmenter la production de bioénergie en employant de nouvelles technologies de conversion permettant de mieux capter l’énergie enfermée dans les résidus de produits forestiers.

La bioénergie forestière compense l’utilisation de combustibles fossiles

La biomasse forestière constitue une source renouvelable de matières premières pour la production d’énergie. À la condition que cette biomasse provienne d’une forêt gérée de manière durable et renouvelée par régénérescence, on peut considérer que les émissions de GES découlant de la production de bioénergie compensent – du moins dans une large mesure – les émissions attribuables aux combustibles fossiles. En effet, durant son cycle biologique, le carbone est absorbé par les arbres et s’intègre à la biomasse forestière; lorsque les arbres meurent et se décomposent, le carbone est rejeté dans l’atmosphère, puis réabsorbé pour assurer la régénérescence de la forêt. La conversion de la biomasse en énergie permet de capturer efficacement l’énergie du carbone. Bien que cette conversion entraîne l’émission de dioxyde de carbone et d’autres GES dans l’atmosphère, elle remplace aussi l’utilisation de combustibles fossiles, et permet d’éviter les émissions carboniques qui y sont associées. La biomasse forestière peut donc être utilisée pour produire de l’énergie, tandis que la croissance continue de la forêt permet de recapturer la plus grande partie du dioxyde de carbone émis par cette production. La recapture du carbone s’échelonne toutefois sur toute la période nécessaire pour que la forêt reprenne sa taille initiale, et même plus. Comme la bioénergie forestière présente une valeur énergétique inférieure à celle des combustibles fossiles, elle peut en fait générer, à court terme, des émissions de CO2 plus importantes. Au fil du temps, elle présente cependant un bilan positif pour l’atmosphère en raison du caractère renouvelable de la forêt; la bioénergie constitue donc un moyen efficace de réduire les émissions nettes de GES. La période durant laquelle des bénéfices sont réalisés dépend du type de combustible fossile remplacé, de la technologie de conversion employée, des taux de croissance de la forêt ainsi que des usages et du cycle de vie du bois ou des résidus utilisés s’ils n’avaient pas servi à produire de la bioénergie.

Devrait-on accroître la production de bioénergie forestière?

Les forêts nous fournissent toutes sortes de produits et services, qu’il s’agisse de produits courants comme le bois d’oeuvre destiné à la construction de maisons et le papier journal, ou encore de parcs et d’étendues sauvages ou d’autres services environnementaux. L’intérêt croissant que suscite la bioénergie soulève plusieurs questions.

Il faut d’abord déterminer la quantité de biomasse forestière que l’on peut prélever d’un site sans en réduire la durabilité du point de vue de l’environnement, ce qui comprend la productivité. Les forêts constituent une ressource renouvelable, et de nombreux règlements ont été adoptés pour assurer leur exploitation responsable et leur régénération complète. Par le passé, seuls les troncs d’arbre étaient récoltés, selon le mode d’exploitation par tronc entier. Le reste de la biomasse abandonnée sur le parterre de coupe se décomposait, restituant des nutriments au sol et fournissant nourriture et habitat à toutes sortes d’organismes et d’animaux. Aujourd’hui, on récolte souvent toutes les parties aériennes de l’arbre, selon le mode d’exploitation par arbres entiers, la tête des arbres et les branches étant entassés au bord des routes. L’optimisation de l’utilisation de la biomasse pourrait favoriser le mode d’exploitation par arbres entiers. Dans les pays nordiques, au Royaume-Uni et dans certaines régions des États-Unis, on a toutefois noté des pertes de productivité à la suite du prélèvement intensif de biomasse forestière. Des scientifiques du Canada et d’ailleurs cherchent maintenant à déterminer la quantité de biomasse, en plus des troncs, pouvant être prélevée de façon continue dans différents types de sites, en vue d’établir des directives à l’intention des aménagistes forestiers. Selon les résultats préliminaires des chercheurs canadiens, la quantité de biomasse supplémentaire pouvant être retirée des sites varie en fonction de nombreux facteurs, dont le type de sol et sa profondeur ainsi que les conditions climatiques. Les chercheurs évaluent également la faisabilité de cultiver des arbres expressément pour produire de l’énergie. Compte tenu de l’augmentation des prix de l’énergie et des avancées technologiques, les plantations énergétiques et le prélèvement intensif de biomasse forestière sur les parterres de coupe pour produire de l’énergie présenteront probablement un intérêt économique de plus en plus grand.

Quel est le meilleur usage que l’on puisse faire des forêts du Canada?

La grande question est peut‑être de déterminer le meilleur usage que l’on puisse faire de nos forêts. Devrions‑nous les exploiter davantage pour fabriquer plus de produits forestiers classiques (qui sont souvent plus respectueux du climat que les produits de remplacement), les préserver pour le stockage du carbone, nous en servir pour produire plus de bioénergie et ainsi compenser l’utilisation de combustibles fossiles, ou une combinaison de tout cela? Les forestiers ont toujours pris leurs décisions en visant un équilibre entre les différents intérêts en jeu par rapport aux forêts. Ces décisions se sont complexifiées alors que les gouvernements doivent déterminer la meilleure façon d’utiliser les terres forestières publiques dans l’intérêt de tous, compte tenu de la multiplicité des usages et des valeurs. En général, l’emploi de sous-produits de procédés industriels pour la production de bioénergie (ce qui correspond à la situation actuelle) est avantageux sur les plans économique et environnemental. Cependant, l’évaluation et la combinaison des différents usages que l’on peut faire de la forêt, dont le prélèvement accru de biomasse pour produire de la bioénergie, font partie d’une équation complexe pour laquelle il n’existe pas de solution unique convenant à toutes les situations. Les réponses varient en fonction des valeurs sociales, des conditions locales et des répercussions économiques, sociales et environnementales des usages actuels et nouveaux de la forêt.

Vaut-il mieux utiliser le bois récupéré pour produire de la bioénergie ou le laisser se décomposer en forêt?

On prévoit que les forêts canadiennes détruites par des incendies ou des insectes produiront deux fois plus de bois mort que les forêts récoltées; la totalité de ces résidus ne sera cependant pas immédiatement disponible. Le bois mort laissé sur les parterres de coupe ou les sites perturbés par des incendies ou des infestations d’insectes se décompose et libère du dioxyde de carbone dans l’atmosphère. On pourrait penser qu’il est préférable de récupérer ce bois mort et de le convertir en bioénergie; le carbone serait alors rejeté rapidement dans l’atmosphère, alors qu’il le serait lentement si le bois se décomposait naturellement. Tout dépend cependant de la période considérée. La bioénergie forestière présente généralement une valeur énergétique moindre et émet davantage de GES par unité d’énergie produite que les énergies obtenues au moyen de combustibles fossiles (au moment où le combustible est converti en énergie). La conversion de bois récupéré en bioénergie compense donc l’utilisation de combustibles fossiles, mais entraîne dans l’immédiat des émissions carboniques plus élevées. À court terme, les émissions sont moindres si on laisse le bois mort se décomposer lentement dans la forêt. Mais la bioénergie entraîne toujours des émissions nettes inférieures à long terme (ce peut être sur plusieurs décennies), car l’utilisation d’une certaine quantité de combustibles fossiles a été compensée de manière « permanente » par l’utilisation de biomasse qui se serait décomposée de toute façon. Le point d’équilibre est plus vite atteint lorsqu’on emploie une biomasse à décomposition rapide, comme des résidus d’exploitation, plutôt que des grosses grumes, lorsque la biomasse est convertie en énergie avec une efficacité accrue, et que la technologie remplacée entraîne des émissions de GES élevées par unité d’énergie produite (par exemple, le mazout comparativement au gaz naturel). Le point d’équilibre est plus long à atteindre si une partie de la régénération préexistante est perdue à cause de la coupe de récupération, et est fonction de l’ampleur de cette perte et du stade de succession. La pratique consistant à brûler les résidus d’exploitation sur place ou à les empiler en bordure de route en vue de leur élimination est néfaste, car elle entraîne le rejet immédiat du carbone sans que l’énergie soit captée de façon à compenser l’utilisation de combustibles fossiles.

La comptabilisation sur l’ensemble du cycle de vie de toutes les émissions et de la séquestration du carbone, du début du processus à la consommation finale, est essentielle si l’on veut comparer les effets nets sur le carbone atmosphérique de différentes sources d’énergie par unité d’énergie produite.

Pourquoi exporte-t-on les granulés de bois en Europe au lieu de les utiliser au Canada?

Les granulés de bois

Les granulés de bois sont formés de fibres de bois (généralement des résidus de scierie) broyées puis comprimées, et peuvent être brûlés de diverses manières pour produire de l’énergie. Près de 85 % de la production de granulés du Canada, soit environ 1,3 million de tonnes, est destinée à l’exportation (ce qui représente moins de 1 % des exportations du secteur forestier canadien en termes de valeur). Cette situation est due au fait que contrairement au Canada, de nombreux pays d’Europe ne disposent pas d’abondantes réserves de combustibles fossiles et doivent donc diversifier leur éventail de sources d’énergie de façon à être moins dépendants de pays comme la Russie, de qui ils achètent du gaz naturel pour produire de l’électricité. En outre, les prix de l’électricité résidentielle en Europe sont généralement deux fois plus élevés qu’au Canada, ce qui rehausse la compétitivité de la bioénergie comme source de chaleur et d’électricité. Enfin, la bioénergie est un élément important de la stratégie adoptée par l’Union européenne pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions de GES, et plusieurs pays membres ont établi des politiques visant à favoriser son utilisation. Ainsi, en vertu de la politique de l’UE, les services publics qui intègrent la biomasse à leurs sources d’approvisionnement en combustibles peuvent obtenir des crédits de carbone pour la production de bioénergie. Les prix élevés de l’énergie ainsi que les préoccupations en matière de sécurité énergétique et de changement climatique qui ont mené à l’établissement d’exigences concernant les énergies renouvelables et à l’échange de droits d’émission de carbone ont fait en sorte que les pays européens sont disposés à payer beaucoup plus cher les granulés de bois que le prix au Canada.

La bioénergie forestière est-elle bénéfique pour l’environnement? (Version PDF)

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