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Questions d’ordre planétaire

2.1 APERÇU DES IMPACTS ET DES MESURES D'ADAPTATION À L'ÉCHELLE PLANÉTAIRE - QUESTIONS D'ÉQUITÉ

Équité géographique

Le changement climatique met en jeu un cas classique d'iniquité entre les riches et les pauvres de la planète. Les peuples et les pays qui se sont enrichis grâce à des économies reposant sur l'utilisation de combustibles fossiles infligent aux pays les plus pauvres des changements préjudiciables qui se manifestent sous forme de catastrophes et de menace aux approvisionnements en eau et en nourriture, cons équences d'un climat en évolution. Pourtant, ce sont ces pays les plus pauvres et les plus vulnérables qui contribuent le moins au fardeau mondial des gaz à effet de serre (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 1994; Stern, 2006). La disparité entre les riches et les pauvres due à des facteurs sociaux et économiques sera probablement aggravée par le changement climatique (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2001c).

Le changement climatique pourra aussi avoir des conséquences disproportionnées sur les collectivités côtières. En effet, ses répercussions les plus répandues sont entre autres celles dues au réchauffement des océans du globe, qui contribue à l'élévation du niveau de la mer, à une augmentation de l'intensité et de la durée des cyclones tropicaux et à des changements de la répartition des populations de poissons. Parmi les répercussions touchant les zones côtières et les collectivités littorales figurent l'érosion des plages et des traits de côte, la perte de récifs coralliens et une augmentation de la fréquence et de la gravité des inondations de terres basses pendant les tempêtes. Des mesures d'adaptation de grande portée devront être prises, sans quoi 80 millions de personnes de plus seront en danger d'être inondées dans les zones côtières d'ici les années 2080, et le danger ne fera que s'intensifier avec le temps (Parry et al., 2001).

Les incidences sur la santé humaine découlant des changements de la disponibilité et de la qualité de l'eau, de la propagation de maladies tropicales, ainsi que les répercussions sur les systèmes alimentaires et les catastrophes naturelles touchent aussi, et très gravement, les collectivités les plus pauvres, soit celles qui sont le moins en mesure de s'adapter (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2001b, 2007b). On décrit ailleurs, dans le présent chapitre, comment l'aide technique du Canada peut appuyer l'adaptation dans les pays moins développés. L'adoption de mesures de développement durable permet de réduire de façon significative les impacts du changement climatique (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2007b).

Équité intergénérationnelle

Outre les préoccupations liées à l'iniquité géographique, la question du changement climatique se caractérise aussi par une iniquité dans le temps. En effet, les émissions actuelles auront également des répercussions, pour la plupart défavorables, sur de nombreuses générations à venir. Par exemple, si les concentrations de gaz à effet de serre étaient immédiatement stabilisées aux niveaux de 2006 (379 ppm de CO2), le niveau de la mer continuerait de monter pendant plus de 500 ans en raison de l'expansion thermique et pendant des millénaires en raison de la fonte des glaces terrestres (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2007a). Les mesures d'adaptation concernant les régions côtières exigent donc des stratégies à long terme.

2.2 CATASTROPHES NATURELLES, ASSURANCE ET RÉASSURANCE, ET AIDE HUMANITAIRE

Les phénomènes météorologiques extrêmes peuvent se transformer en catastrophes naturelles lorsqu'ils frappent des collectivités vulnérables qui ne se sont pas préparées à y faire face. La population du Canada peut subir les effets des catastrophes naturelles survenues dans d'autres pays du fait des répercussions indirectes sur la disponibilité et le coût de biens et services, de changements dans les marchés financiers, et de demandes de dons en argent, en vêtements et en nourriture. On en a vu un exemple frappant avec la hausse subite des prix du p étrole et du gaz au Canada après l'ouragan Katrina, en 2005, et son incidence sur la production de pétrole dans le golfe du Mexique (Kovacs, 2005).

Les conséquences possibles des tendances liées au climat, qui vont se poursuivre à mesure qu'il évolue, ont des implications majeures pour l'industrie de l'assurance et sur le plan de la souffrance humaine. Ces tendances révèlent aussi qu'on observera un besoin croissant d'aide humanitaire d'urgence à l'étranger et qu'il faudra reconnaître l'importance d'aider les régions en voie de développement à mettre au point des projets d'atténuation des pertes dues aux catastrophes comme mesure d'adaptation au changement climatique.

Évolution des conditions

La croissance de la population mondiale et l'exposition des infrastructures à des catastrophes d'ordre météorologique s'accompagnent aussi d'une augmentation prévue des pertes économiques. On a cependant des indications que les pertes causées par des phénomènes climatiques ou météorologiques ont augmenté plus rapidement que ne pourrait l'expliquer la seule exposition. Il appert également que la fréquence des événements météorologiques violents responsables de pertes majeures, notamment les tempêtes, les inondations et les sécheresses, a elle aussi augmenté. Sur la planète, le nombre annuel de tempêtes violentes causant des dégâts, qui était en moyenne de 150 au début des années 1980, a atteint les 250 à 300 au cours de la période de 2000 à 2004 (Mills, 2005). Les pertes totales de biens (à l'exclusion des incidences sur la santé) ont augmenté deux fois plus vite que ne l'aurait laissé penser la croissance de l'économie et de la population mondiales (Mills, 2005). Une fraction significative de la croissance des pertes dues à des catastrophes est donc attribuable au climat en évolution, comme le montre la tendance à la hausse des extrêmes climatiques de diverses sortes (voir la section 1.2) et tel que le confirment les projections des modèles du climat (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2001a, 2007a). Elle s'est aussi produite malgré les tentatives de nombreux pays de réduire ces pertes, par exemple par l'adoption de codes de construction plus stricts, de meilleurs systèmes d'avertissement et de projets de réduction des pertes dues à l'inondation. Il faut cependant constater que l'amélioration des systèmes d'avertissement a permis de faire baisser le nombre de décès au cours des années 1990 par rapport aux années 1970, même si les populations concernées ont connu une augmentation fulgurante.

Pour 1975 et compte tenu des effets de l'inflation, les pertes économiques mondiales imputables à des catastrophes d'ordre météorologique se sont chiffrées à 4 milliards de dollars US; 30 ans plus tard, en 2005, elles dépassaient 200 milliards de dollars US, soit cinquante fois plus (Munich Reinsurance, 2006). Les sommes vers ées par les compagnies d'assurances pour des dommages aux biens ont également été multipliées par 50 au cours de la même période, passant de 1,6 à 83 milliards de dollars US, montants ajustés pour tenir compte des effets de l'inflation. Bien que l'industrie de l'assurance existe depuis plus de 300 ans, sept des dix catastrophes qui lui ont co ûté le plus cher se sont manifestées depuis 2001 (Mills, 2005). Des données provenant du Centre for Research on Epidemiology of Disasters (Centre de recherches sur l'épidémiologie des désastres) révèlent que, pour la période allant de 1996 à 2005, 80 p.100 de toutes les catastrophes naturelles ont été d'ordre météorologique ou hydrologique; elles indiquent en outre que plus de 1,5 milliard de personnes ont été touchées par de telles catastrophes entre 2000 et 2004 (Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, 2006).

La Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (2004) a étudié 3 000 catastrophes naturelles survenues un peu partout sur la planète entre 1994 et 2003. Plus de 80 p. 100 d'entre elles découlaient de phénomènes météorologiques à fortes répercussions. Au cours de cette période, on a enregistré 580 000 morts et des pertes économiques de 680 milliards de dollars US, et en moyenne, 250 millions de personnes par année ont été chassées de leur maison. Plus de 95 p. 100 des dommages aux biens se sont produits dans des pays aisés ou à revenu modéré, les pertes les plus importantes ayant lieu aux États-Unis. En contraste, plus de 90 p. 100 des décès dus aux catastrophes sont survenus dans des pays à revenu modéré ou bas, surtout en Asie et en Afrique (Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, 2004), où vivaient par ailleurs 98 p. 100 des personnes déplacées par ces catastrophes. Les conditions météorologiques à fortes répercussions constituent essentiellement un stress économique dans des pays aisés comme le Canada mais, dans les pays plus pauvres, elles peuvent devenir une menace sensible pour la vie, la sant é et la sécurité.

Le nombre moyen de décès par catastrophe est de 23 dans les pays très industrialisés, mais grimpe à plus de 1000 dans les pays moins développés (Organisation météorologique mondiale, 2006). Bien que les coûts absolus des catastrophes dans les pays très développés soient élevés, ils sont généralement très inférieurs au produit intérieur brut (PIB) des pays en question (Handmer, 2003); par exemple, bien que l'ouragan Katrina ait causé des pertes énormes, celles-ci ne représentent qu'une petite fraction du PIB des États-Unis. En contraste, les pertes causées par l'ouragan Mitch, qui a frappé le Honduras en 1998, ont dépassé 75 p. 100 du PIB de ce pays. En Amérique centrale et dans les Caraïbes, les dégâts causés par les ouragans peuvent retarder le développement économique de ces régions pendant de nombreuses années, car ils exigent que les investissements soient consacrés aux efforts de remise sur pied plutôt qu'à la croissance (International Strategy for Disaster Reduction, 2005a).

Aide internationale

Depuis longtemps, les Canadiens appuient les efforts internationaux de secours en cas de catastrophe, et cette aide a augment é au cours des dernières années. Récemment, les sinistrés du tsunami dans le sud de l'Asie, de la sécheresse en Afrique et des ouragans qui ont frappé les Caraïbes, l'Amérique centrale et les États-Unis ont reçu un secours considérable de la part d'individus provenant de partout au Canada.

Depuis plusieurs décennies, l'aide internationale et canadienne aux victimes de catastrophes croît avec l'augmentation de l'occurrence des phénomènes extrêmes. Le grand défi est maintenant de voir plus loin que le secours aux sinistrés et de commencer à se concentrer sur le renforcement de la résilience des collectivités, de manière à ce qu'elles puissent mieux faire face aux menaces que présentent les conditions météorologiques à fort impact. La période de reconstruction qui suit une catastrophe naturelle est probablement le moment id éal pour investir dans une infrastructure et des bâtiments résilients aux catastrophes ainsi que dans de nouveaux emplacements plutôt que de replacer les populations et les infrastructures dans des conditions vuln érables. En outre, il s'agit d'une période favorable aux investissements dans des mesures de nature non structurale visant la réduction des risques associés aux catastrophes, telles que des systèmes améliorés d'avertissement et de préparation en cas d'urgence et des modifications appropriées apportées à l'utilisation des terres. Il s'agit de concepts importants dont il faut tenir compte dans le cadre de l'aide offerte en vue de la réduction des pertes dues aux catastrophes.

Industrie internationale de l'assurance

L'industrie mondiale de l'assurance fournit un mécanisme essentiel pour évaluer et regrouper les menaces aux biens liées aux conditions météorologiques à fort impact.

Ces dernières années, le coût de l'assurance des maisons et des entreprises a augmenté dans les régions où de nouvelles recherches ont démontré que les dommages prévus seront plus élevés que par le passé. On en a eu des preuves en Floride et sur la côte du golfe du Mexique, aux États-Unis. Cependant, sur la plupart des marchés, le coût de l'assurance des biens est resté stable, voire a baissé, comparativement à la valeur des propriétés. Certains épisodes météorologiques violents n'ont pas eu d'incidence sur le coût de l'assurance. Par exemple, la tempête de verglas de 1998, l'événement le plus coûteux pour les assureurs canadiens, n'a pas entraîné de hausse des primes, parce qu'elle a généralement été considérée par l'industrie comme un risque dont la probabilité n'avait pas changé. Qui plus est, plus de 90 p. 100 des facteurs ayant une incidence sur le coût de l'assurance ne sont pas liés aux conditions météorologiques, puisqu'il s'agit de facteurs tels que la fréquence des vols, le nombre d'incendies urbains ou le coût de réparation des véhicules; c'est pourquoi les augmentations des dégâts liés à des phénomènes météorologiques violents n'ont qu'une faible incidence sur le coût global des polices d'assurances tous risques.

Certaines compagnies assurent les compagnies d'assurances; c'est ce qui s'appelle la réassurance. Une grande partie des coûts de réparation des propriétés endommagées par des phénomènes météorologiques violents est assumée par l'industrie de la réassurance, par l'intermédiaire des sommes qu'elle verse aux compagnies d'assurances. Le secteur de la réassurance est toujours en effervescence. Les compagnies d'assurances ont des primes de réassurance plus élevées dans les régions où augmente le risque de phénomènes météorologiques violents, comme les Caraïbes et la côte atlantique des États-Unis. Il s'ensuit que le coût de l'assurance cesse d'être abordable pour nombre de gens moins aisés de ces régions. À ce jour, toutefois, le coût de la réassurance est resté stable pour les compagnies d'assurances au Canada.

Fourniture de biens et de services internationaux

Les phénomènes climatiques extrêmes ont une incidence sur la disponibilité et le coût des biens et des services acquis par les Canadiens. L'effet de l'ouragan Katrina sur le prix et l'approvisionnement en essence a déjà été mentionné (Kovacs, 2005). Par le passé, le mauvais temps a déjà touché la production de certaines cultures, comme celle du caféier ou de l'oranger. L'augmentation de l'activité des ouragans a perturbé les plans de vacances de Canadiens au Mexique, dans les Caraïbes et aux États-Unis. Nombre d'entreprises et de particuliers canadiens possèdent des propriétés menacées, surtout en Floride, dans les États du golfe du Mexique et dans les Caraïbes, et ils ont subi des hausses importantes de leurs primes d'assurance.

Les grandes catastrophes peuvent aussi agir sur les marchés financiers internationaux, ceux-là mêmes qui sont fréquentés par de nombreux Canadiens, mais leur effet s'est plutôt fait sentir sur des secteurs ou des entreprises spécifiques, notamment les secteurs de l'énergie et de l'alimentation, comme dans le cas de l'ouragan Katrina. Ces chocs financiers ont une incidence immédiate sur le marché financier canadien, même si la catastrophe survient dans un pays très éloigné.

2.3 QUESTIONS RELATIVES AU COMMERCE

Le Canada, plus peut-être que tout autre pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a toutes les raisons de se demander quelle incidence le changement climatique pourrait avoir sur son commerce international, en raison du rôle extrêmement important que ce dernier joue dans son économie nationale. Les exportations et importations canadiennes constituaient 70 p. 100 du produit intérieur brut en 2006, et le commerce y contribuait directement pour 12,8 p. 100 (Affaires ext érieures et Commerce international Canada, 2006).

Les répercussions les plus probables du changement climatique sur le commerce international tiennent au fait qu'il peut imposer des altérations majeures à sa base d'avantages comparatifs - un des moteurs clés du commerce. Ces répercussions pourraient se manifester :

  • d'abord, en altérant la compétitivité des producteurs canadiens (de manière positive ou négative);
  • ensuite, en altérant aussi la compétitivité des entreprises étrangères qui font concurrence aux producteurs canadiens tant sur le marché canadien que sur celui de pays tiers;
  • enfin, en menant à l'adoption de politiques qui, à leur tour, auront une incidence sur la compétitivité sur les marchés étrangers.

La troisième situation (répercussions en matière de politiques) n'entre pas dans le cadre de la présente analyse. Les deux premières feront, par contre, l'objet de la discussion qui va suivre, en examinant les conséquences du changement climatique pour certains des secteurs exportateurs clés du Canada : la foresterie, l'agriculture et les pêches. La question de l'énergie est traitée à la section 4.2.

Il n'est pas possible d'établir avec certitude, pour aucun de ces secteurs, quelles incidences le changement climatique aura sur les régimes commerciaux du Canada. Dans bien des cas, il persiste une incertitude quant aux changements r égionaux et locaux du climat, et à la dynamique des liens entre ces changements et leurs conséquences biophysiques (p. ex., sur la productivité primaire nette). De plus, certains types d'impacts (comme les phénomènes météorologiques extrêmes) ne peuvent, dans le meilleur des cas, être exprimés qu'en termes de probabilité. Et, alors que la documentation se concentre majoritairement sur les questions liées à l'offre, pour traduire cet état de choses en termes de répercussions sur les prix, il faut auparavant avoir recours à des hypothèses extrêmement conjecturales sur la demande à moyen et à long termes d'exportations canadiennes. Enfin, il demeure une diversité de modèles du changement climatique, de modèles sectoriels et d'hypothèses en matière d'atténuation et d'adaptation entre lesquels choisir, de façon à ce que l'on dispose de toute une gamme de scénarios plausibles.

Foresterie

La foresterie est un des grands secteurs exportateurs du Canada. Sur la période de cinq ans se terminant en 2005, les exportations de produits forestiers ont repr ésenté plus de 10 p. 100 des exportations totales de marchandises du Canada, atteignent une moyenne de 45 milliards de dollars par an (voir le tableau 1). Dans l'ensemble, le secteur forestier crée plus de 370 000 emplois directs (Ressources naturelles Canada, 2001) et un total estimatif de 555 000 emplois indirects et induits (Ressources naturelles Canada, 2005).

Le plus grand marché d'exportation est de loin celui des États-Unis, qui absorbe environ 85 p. 100 des exportations de produits forestiers du Canada et sur lequel les producteurs canadiens de bois d'œuvre sont en concurrence directe avec leurs homologues américains. Il est suivi par la Chine, le Japon et l'Union européenne. Ce sont les produits de l'industrie des pâtes et papiers qui dominent les exportations, totalisant environ la moitié de la valeur des marchandises (voir le tableau 2). Les produits bruts du bois et les semi-produits en bois se partagent à peu près également l'autre moitié. La plus grande partie de la production est centrée soit dans l'est (Québec et Ontario), soit dans l'ouest (Colombie-Britannique et Alberta), la première région contribuant le plus aux exportations de produits transformés et la seconde, aux exportations de produits bruts. Les exportations de panneaux de bois augmentent régulièrement depuis dix ans et dépassent maintenant les exportations de papier journal, autrefois au premier rang mais qui, avec celles de p âte de bois, ont baissé au cours de la même période (Ressources naturelles Canada, 2005).

TABLEAU 1 : Principaux secteurs exportateurs du Canada (en millions de dollars de 2005; Industrie Canada, 2006).
Secteur Valeur (en millions de dollars de 2005) Pourcentage
(2005) 
2001 2002 2003 2004 2005
Produits minéraux 61 560  53 826  64 996  72 373  92 651  21.3 
Véhicules, aéronefs, navires et
autres équipements de transport
97 394  98 988  90 107  91 199  89 676  20.6 
Machinerie; appareils ou équipements
mécaniques, électriques et électroniques
56 785  52 601  47 764  51 589  54 286  12.5 
Métaux communs et articles de métaux communs 24 946  26 591  24 934  30 690  32 613  7.5 
Pâte de bois, papier  27 769  26 471  24 102  24 677  23 707  5.4 
Produits des industries chimiques et connexes 16 275  16 890  16 877  20 106  22 881  5.3 
Bois et articles de bois  19 127  19 023  17 694  22 003  20 316  4.7 
Plastiques, caoutchouc et articles faits avec ces matières 15 628  16 180  15 791  17 088  18 210  4.2 
Animaux vivants et produits animaux 11 274  11 830  9 701  9 912  10 522  2.4 
Produits maraîchers  10 284  9 013  9 118  10 258  9 480  2.2 
Produits alimentaires, boissons, alcools, produits du tabac 8 436  8 912  9 207  9 523  9 176  2.1 
Total des exportations 404 085 396 381 381 000 411 840 435 641 88.0
TABLEAU 2 : Exportations canadiennes de produits forestiers, par région (Statistique Canada, 2004).
  Valeur en 2004 (en millions de dollars actuels) Pourcentage
Québec Ontario Alberta Colombie-Britannique Autre Canada
Produits bruts du bois
(surtout des billes de résineux) 
4 580  3 204  1 902  9 174  2 189  18 860 
24,3p 100 17,0p 100 10,1p 100 48,6p 100 10.4p 100  
Semi-produits en bois
(bois d’œuvre, contreplaqué) 
7 246  5 653  1 467  4 954  3 343  19 321 
37,5p. 100 29,3p 100 7,6p 100 25,6p 100 14,8p 100  
Produits de pâtes et papiers
(pâte, papier, papier journal)
11 896  8 978  3 399  14 693  5 601  38 966 
30,5p 100 23,0p 100 8,7p 100 37,7p 100 12,6p 100  

Le changement climatique aura une incidence sur la productivité, la répartition et la composition en espèces des forêts d'Amérique du Nord (Shugart et al., 2003; Lemmen and Warren, 2004). Les études ont tendance à examiner soit les effets sur la productivité forestière (découlant des changements de la température et de l'augmentation de la fertilisation par le CO2), soit les effets de perturbations telles que les incendies, les ravageurs, les s écheresses et les tempêtes. Il n'existe malheureusement qu'un nombre limité d'études qui intègrent ces deux pistes de recherche.

Les études du premier type ont tendance à conclure que, durant le prochain siècle, on disposera de plus de bois d'œuvre grâce à un accroissement de la productivité découlant elle-même d'un allongement de la saison de croissance, d'une augmentation des précipitations (par endroits) et d'une augmentation de la fertilisation par le CO2 (Medlyn et al., 2000; Irland et al., 2001; Sigurdsson et al., 2002), bien qu'une incertitude persiste quant à savoir si ce dernier aspect aura plus qu'un effet à court terme. Les effets précis varieront d'une région à l'autre, selon les changements climatiques qui y prendront place, les conditions de d épart et le type de forêt. Par exemple, bien qu'une élévation de la température fasse en général croître la productivité, elle peut aussi se traduire par une augmentation des sécheresses dans la tremblaie-parc de l'Ouest et par un dépérissement considérable (Hogg et al., 2002).

Les études portant sur les perturbations des forêts formulent leurs prédictions en termes de superficie perdue. À partir d'une modélisation, Sohngen et al. (2001) ont estimé qu'environ 1,6 million d'hectares du dépérissement qui touche chaque année les forêts d'Amérique du Nord est imputable au changement climatique. Un certain nombre d'insectes ravageurs étendent leur aire de répartition à mesure que les hivers se réchauffent (Hogg et al., 2002; Williams et Liebhold, 2002; Carroll et al., 2004). La forêt boréale, où les insectes peuvent faire jusqu'à deux fois plus de dommages que les feux, est particulièrement vulnérable (Volney et Flemming, 2000). Le danger de feu est un autre problème important, puisqu'un certain nombre d'études prédisent pour le Canada une augmentation de la durée et de la gravité des saisons de feux dans les scénarios de changement climatique (Li et al., 2000; Flannigan et al., 2001, 2005; Brown et al., 2004; Gillett et Weaver, 2004). La plupart d'entre elles prévoient un accroissement des risques dans l'ouest du Canada et une baisse due à l'augmentation projetée des précipitations dans les forêts boréales de l'Est. Selon Flannigan et al. (2005), on pourrait voir d'ici à 2100 un doublement de la superficie brûlée chaque année au Canada. On prévoit aussi une augmentation de l'activité de la foudre et de la superficie brûlée aux États-Unis.

La Colombie-Britannique et l'Alberta (voir le tableau 2) semblent très susceptibles de souffrir des effets de l'augmentation combinée du stress hydrique, du risque d'incendie et de l'activité croissante des ravageurs. D'ailleurs, la prolifération du dendroctone du pin ponderosa en Colombie-Britannique touche déjà le commerce, entraînant une accélération de la coupe de récupération et présageant un rétrécissement de l'offre à moyen terme (voir le chapitre 8; Ressources naturelles Canada, 2005). Le dendroctone du pin ponderosa a commenc é sa progression vers l'est et, au printemps 2007, infestait déjà quelque 2,8 millions d'arbres en Alberta (Alberta Sustainable Resource Development, 2007). Les deux autres grands producteurs de produits forestiers, soit le Qu ébec et l'Ontario, en particulier dans le domaine des pâtes et papiers, pourraient tirer profit autant de l'augmentation des précipitations que de celle de la productivité dans certaines sous-régions de ces provinces. Cependant, les gains potentiels dans certaines régions de l'Ontario seraient modérés par des pertes dans d'autres parties de la province dues à une baisse de l'humidité du sol et au stress causé par la sécheresse (voir le chapitre 6).

Sohngen et al. (2001) ont effectué une des rares analyses mondiales à inclure à la fois les effets d'une augmentation de la productivité et ceux liés aux perturbations. D'un côté, cette étude prédit une expansion nette de 3 à 4 p. 100 des forêts canadiennes (et nord-américaines), mais, de l'autre, elle indique que l'Amérique du Nord connaîtra un dépérissement plus prononcé que ses chez concurrents du reste du monde (28 à 29 p. 100 contre 6 à 14 p. 100 respectivement). On prévoit que le résultat économique de l'augmentation de l'offre nord-américaine sera une baisse des prix des produits forestiers et que cette dernière ne serait pas compensée par une augmentation des ventes (Songhen et Sedjo, 2005). De plus, les augmentations de la productivit é seront moins prononcées en Amérique du Nord que dans les autres pays producteurs (p. ex., 17 p. 100 contre 32 à 42 p. 100 respectivement; Sohngen et al., 2001). Cette étude semble être la seule à indiquer que l'on assistera à une baisse des prix mondiaux (selon les hypothèses concernant la demande) et à une réduction de la part du marché mondial pour les producteurs canadiens (et nord-américains en général).

En fin de compte, les prix des produits forestiers exportés par le Canada semblent devoir chuter avec l'augmentation de l'offre. Dans l'ouest du Canada, il pourrait s'agir d'un phénomène à plus court terme, attribuable à une accélération de la coupe de récupération (voir le chapitre 8). L'augmentation de la productivité chez les concurrents étrangers y contribuera également, surtout en ce qui a trait aux exportations vers des pays autres que les États-Unis. L'accroissement des volumes exportés pourrait ne pas suffire à compenser la baisse des prix.

Agriculture

L'agriculture est un autre grand secteur exportateur au Canada qui représente une moyenne de 5 p. 100 du total des marchandises exportées sur la période de cinq ans se terminant en 2005 et plus de 20,2 milliards de dollars de ventes par ann ée (voir le tableau 1). Les producteurs canadiens sont très conscients du fait qu'ils vont être touchés non seulement par un climat en évolution, ici, au Canada, mais aussi par les phénomènes climatiques survenant dans d'autres parties du monde, comme en témoignent ces titres parus dans The Western Producer (2006) : « Le blé des États-Unis souffre de la sécheresse » et « La sécheresse en Australie bouleverse le marché des ventes aux enchères » (Duckworth, 2007 [traduction]).

Les céréales et les oléagineux, et leurs produits dérivés, dominent ce secteur au Canada, puisqu'ils représentent environ 40 p. 100 de la valeur des exportations (Agriculture et Agroalimentaire Canada, 2005). Les exportations d'animaux vivants et de viande rouge, surtout à destination des États-Unis, y ont de tous temps occupé une place importante, soit environ 25 p. 100, mais leur contribution est tombée à 20 p. 100 depuis les interdictions déclarées en 2003 par les grands marchés d'exportation en raison de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB). En 2004, plus de 60 p. 100 des exportations agricoles du Canada se sont faites en direction des États-Unis, suivis du Japon et de l'Union européenne qui, respectivement, comptent pour 9,4 p. 100 et 6 p. 100 de ces exportations. Le blé est la plus importante culture du Canada, aussi bien par rapport aux superficies emblav ées que par rapport à la valeur des exportations; il constitue la plus grosse source agricole de revenus d'exportation, ayant totalisé 3,8 milliards de dollars en 2004 (Agriculture et Agroalimentaire Canada, 2004).

Tel que décrit dans les divers chapitres régionaux du présent volume, le secteur agricole du Canada doit s'attendre à ce que le changement climatique ait sur lui des effets tant positifs que négatifs. Parmi les impacts positifs figurent un allongement des saisons de croissance, une augmentation de la productivit é liée au réchauffement et à la fertilisation par le CO2 et, dans certaines régions, une baisse du stress hydrique. Les impacts négatifs, quant à eux, sont entre autres un accroissement du stress hydrique dans de nombreuses régions, une augmentation des pertes dues aux ravageurs, un processus de planification des cultures rendu plus complexe en raison de l'accroissement de la variabilité climatique (des choix inadéquats entraînant des pertes de cultures) et une augmentation des dommages aux cultures attribuables aux phénomènes météorologiques extrêmes (p. ex., vagues de chaleur, grêle, inondations, sécheresses, etc.). Les répercussions définitives sur la disponibilité de l'eau - un problème clé dans des régions arides telles que les grandes plaines (où croît la majeure partie de la production de blé) et les vallées de l'intérieur de la Colombie-Britannique - dépendront des changements dans les régimes de précipitations faibles et des augmentations de l'évapotranspiration sous l'effet du réchauffement.

L'incertitude règne quant aux répercussions nettes sur l'agriculture canadienne (Lemmen et Warren, 2004). De façon générale, on comprend les effets du réchauffement et de l'augmentation des concentrations de CO2 : ils entraîneront un accroissement de la productivité primaire nette et de la perte d'humidité. Par contre, l'évolution d'autres variables clés est moins claire : disponibilité de l'eau et incidence des mauvaises herbes, des ravageurs et des maladies. Ces incertitudes sont en grande partie attribuables à une modélisation imparfaite du changement climatique aux échelles locale et régionale (p. ex., changements des régimes de précipitations, variabilité et prévisibilité du comportement du climat, incidence des phénomènes météorologiques extrêmes).

Dans le cas des États-Unis, les évaluations faites par Thomson et al. (2005a, b, c) leur permettent de parler avec plus de certitude. Des régions comme le Midwest et le sud-ouest des États-Unis, où la disponibilité de l'eau constitue un facteur limitatif, pourraient connaître des problèmes à mesure que cette ressource se fera de plus en plus rare et que sa variabilité interannuelle augmentera de façon significative. C'est ainsi que le potentiel de rendement du blé a subi les effets de la sécheresse de 2005, au cours de laquelle l'Oklahoma et certaines parties du Texas ont connu des déficits de précipitations de plus de 50 cm sous la normale (The Western Producer, 2006). La culture sous irrigation de blé d'hiver devrait croître en superficie, tandis que l'on prévoit que celle du soya et du maïs va diminuer. Par contre, ces résultats ne prennent pas en considération une foule de facteurs complexes tels que les effets régionaux ou locaux, les ravageurs et les mauvaises herbes. Le modèle ne tient également pas compte des phénomènes météorologiques extrêmes, comme les inondations qui, selon certains chercheurs, entraîneraient des changements importants dans les résultats obtenus à l'aide de la modélisation (Rosenzweig et al., 2002).

Au niveau mondial, Parry et al. (2004) prédisent dans leur étude couvrant quatre grandes cultures et cinq régions que le changement climatique aura probablement une incidence défavorable d'importance légère à modérée sur les rendements, mais cette conclusion suppose l'absence des éventuels effets défavorables causés par les types de stress perturbateurs envisagés plus haut. À l'aide de scénarios faisant intervenir de fortes élévations finales de la température, ils ont constaté que les rendements des céréales baissent beaucoup plus dans les pays en développement que dans les pays développés. Le Canada connaîtrait de faibles accroissements de la productivité, mais la répartition des effets aux échelles locale et régionale n'est pas bien établie.

À l'aide de modèles qui eux aussi font abstraction de nombreux effets défavorables possibles, Rosenzweig et Iglesias (1999) ont constaté que les productions canadiennes de céréales et de cultures protéagineuses pourraient augmenter en moyenne (sur trois modèles) de 15,7 p. 100 et 20,7 p. 100 respectivement à des concentrations atmosphériques de CO2 de 550 ppm et en ayant recours à certaines mesures d'adaptation, les valeurs correspondantes étant de -4,7 p. 100 et 0 p. 100 aux États-Unis. Les exportations de blé font particulièrement bonne figure dans la plupart des scénarios, la productivité canadienne augmentant, alors que celle de la plupart des autres pays baisse. Selon ces mod èles, seule la production de blé de la Nouvelle-Zélande se compare à celle du Canada, mais la Chine et la Communauté des États indépendants connaissent aussi des gains appréciables. L'Amérique latine et le Moyen-Orient se caractérisent par des pertes énormes, et l'Afrique, par des pertes importantes. De plus récentes études prévoient que l'augmentation de la production agricole à des latitudes moyennes à élevées connaîtra une baisse avec une élévation de la température moyenne globale supérieure à 3°C (Group d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2007b).

La non-prévisibilité des mesures d'adaptation vient ajouter à la complexité des résultats concernant le secteur agricole. La capacité des pays à s'adapter aura en effet un impact important sur ces résultats; dans de nombreux scénarios, les rendements baissent en Afrique et, en raison de l'insuffisance de la capacité d'adaptation, l'impact pourrait y être bien pire que dans d'autres régions où on prévoit des baisses similaires (Parry et al., 1999).

Au Canada, le climat deviendrait plus propice à la production de fruits et légumes dans plusieurs régions, et ce, peut-être même au point de faire baisser la dépendance à l'égard des importations. L'avantage concurrentiel du Canada dans la production de raisin de cuve pourrait augmenter par rapport aux r égions plus chaudes et plus sèches d'Australie et de Californie, par exemple. En fin de compte, pour un certain nombre de cultures, la plupart des mod èles prédisent une augmentation de la productivité des agriculteurs canadiens relativement à leurs concurrents étrangers. Cependant, ces modèles n'ont qu'une portée limitée, et c'est probablement l'étude de Lemmen et Warren (2004) qui donne les résultats les plus fiables, concluant sur une note d'incertitude. On ignore encore les répercussions d'un certain nombre d'influences potentiellement défavorables pour bien en comprendre les effets sur la productivité. Les répercussions sur les prix à long terme seront donc de même difficiles à prédire.

En fin de compte, on peut prédire avec un assez bon degré de certitude les grandes lignes des effets du changement climatique à court terme : augmentation de la productivité de l'agriculture canadienne, surtout pour les céréales telles que le blé, par rapport aux partenaires commerciaux que sont les pays en développement, mais à un moindre degré par rapport aux producteurs des États-Unis. On ne sait cependant toujours pas dans quelle mesure ces tendances générales seront atténuées par des influences perturbatrices, comme les ravageurs et les phénomènes météorologiques extrêmes.

Pêches

Les exportations du secteur des pêches, estimées à 4,3 milliards de dollars en 2005 (Pêches et Océans Canada, 2005), contribuent moins à l'économie du Canada que celles de la foresterie et de l'agriculture, mais elles demeurent importantes et, dans certaines collectivités, représentent une fraction énorme des revenus. Un peu plus de la moitié de la valeur de ce secteur est liée aux exportations de mollusques et crustacés, dominées par le homard, le crabe et la crevette. Le saumon représente une autre fraction de 15 p. 100 de la valeur des exportations, dont les deux tiers sont attribuables au saumon de l'Atlantique.

Le secteur des pêches sera couvert en détail à la section 3 et dans les chapitres régionaux. On sait que les stocks de poissons sont vulnérables au changement climatique. Les pêches sont donc peut-être aussi plus menacées encore que l'agriculture et la foresterie. Ces stocks sont cependant soumis à un grand nombre d'autres influences qui rendent difficile d'isoler les impacts du climat. On parle ici, d'une part, des effets directs liés à la hausse de la température de l'eau et aux modifications de circulations océaniques et, d'autre part, des effets indirects tels que des changements dans les régimes de témpérature et d'apport d'eau douce, des perturbations touchant d'autres maillons de la chaîne alimentaire (p. ex., des changements dans les apports en aliments et en éléments nutritifs), des contributions aux proliférations d'algues toxiques et des effets de la synergie entre le changement climatique et des forces comme la prédation humaine, la pollution et l'appauvrissement de l'ozone.

Bien qu'on ne connaisse toujours pas avec précision quels seront les impacts du changement climatique sur le commerce mondial des produits de la p êche canadiens, on retrouve un bon exemple du potentiel de perturbation dans l'effondrement de la pêche de la morue dans l'Atlantique, soit une espèce qui faisait autrefois l'objet d'exportations majeures. Des indications portent à croire que le changement climatique (jumelé à la surpêche) y a joué un rôle important (Rose, 2004). Par ailleurs, certains craignent que des réductions du couvert nival induites par le changement climatique ne fassent baisser les stocks de saumon du Pacifique (Mote et al., 2003). On mentionne à la section 3 des menaces pour les populations de saumon rouge découlant d'une tendance au réchauffement dans l'est du Pacifique Nord et la possibilité que de telles espèces anadromes modifient leur aire de répartition et se retrouvent hors de portée des pêcheurs canadiens. Les pêches et, en particulier, les pêches pélagiques constituent une question de gestion internationale; la dynamique des impacts entra înés par le changement climatique, comme l'altération de la répartition et de l'abondance des stocks de poissons, rendra encore plus délicat ce défi gestionnel (Miller, 2000; Jurado-Molina et Livingston, 2002; Harley et al., 2006).

Autres considérations

On s'attend à un accroissement du commerce de technologies d'adaptation sans danger pour l'environnement (Klein et al., 2006), comme les techniques de protection contre les catastrophes et d'utilisation réduite de l'eau, et les technologies à faibles émissions de gaz à effet de serre (GES). Pour en tirer profit, il faudrait encourager les entreprises du Canada à concevoir de telles technologies à des fins d'adaptation et d'atténuation. Les répercussions sur le secteur canadien de l'automobile, dont le principal débouché est les États-Unis, pourraient dépendre du rendement énergétique des véhicules qui sont fabriqués ici ou dont des pièces sont fabriquées ici. Bien qu'on puisse craindre d'éventuels différends entre les lois et les ententes commerciales et environnementales, les relev és des conflits possibles (Charnovitz, 2003; Cosbey et al., 2003; Magnusson, 2004) tendent à convenir que, dans l'ensemble, il y a peu de conflits qui ne sauraient être évités grâce à une rédaction soigneuse des mesures environnementales.

Lacunes sur le plan des recherches

Les incertitudes et les lacunes sur le plan des recherches concernant les discussions sur les p êches, l'agriculture et la foresterie sont abordées dans la présente section, mais elles font aussi l'objet d'une analyse ailleurs dans ce volume. Il est à noter que peu d'études à caractère mondial sur la foresterie ont réussi à mettre l'accent à la fois sur la productivité et sur les perturbations telles que les feux et les ravageurs. On remarque des lacunes semblables au sujet de l'agriculture, puisqu'aucune des études mondiales examinées ne tenait compte des impacts des ravageurs ou des phénomènes météorologiques extrêmes.

Pour ce qui est du commerce dans ces secteurs et des répercussions économiques que pourrait avoir le changement climatique sur les intérêts du Canada, il reste encore quelques grandes lacunes à combler sur le plan des recherches. Les rares sorties de modèles d'ordre planétaire n'ont pas fourni d'information spécifiquement pertinente pour le Canada et ont tendance à regrouper le Canada et les États-Unis en une seule entité nord-américaine. Les évaluations des répercussions économiques et commerciales sur le Canada exigeront nécessairement le recours à des modèles plus complexes, de façon à ce que l'on puisse faire la distinction entre le Canada et les États-Unis.

Conclusions

La présente section donne un aperçu des impacts possibles du changement climatique sur les régimes de commerce international du Canada. Bien qu'il semble évident qu'il y aura des effets importants, il faudra effectuer d'autres analyses pour mieux en comprendre la portée. De plus, des études supplémentaires s'imposent pour clarifier la nature de ces répercussions.

Cela dit, on dispose de bonnes indications quant à l'orientation générale du changement. D'un point de vue économique, les répercussions sur le secteur forestier seront probablement très importantes, car la productivité du Canada pourrait baisser par rapport à celle de ses concurrents étrangers et les prix pourraient, eux aussi, baisser en raison d'une augmentation de l'offre mondiale. Les répercussions sur l'agriculture seront elles aussi probablement importantes, la productivité canadienne des cultures céréalières destinées à l'exportation augmentant par rapport aux tendances mondiales (dans une moindre proportion toutefois par rapport aux producteurs des États-Unis). Il convient de noter que toutes les issues prévues reposent sur des hypothèses quant au comportement d'adaptation (même quand on présume implicitement qu'il n'y en aura pas) et que les mesures d'adaptation appropriées seront cruciales pour faire en sorte que les risques et les possibilités mentionnés plus haut soient adéquatement pris en considération dans le contexte canadien.

2.4 IMPLICATIONS DU CHANGEMENT CLIMATIQUE EN MATIÈRE DE CONFLITS

Le changement climatique peut rendre la vie plus difficile dans les régions touchées, et certaines d'entre elles risquent même de devenir inhabitables. Il pourrait en effet entraîner une hausse des températures, des variations des régimes de précipitations, une désertification, une élévation du niveau de la mer et une augmentation de la fréquence et de la gravité des événements météorologiques extrêmes (Brooks, 2004). Ces impacts peuvent à leur tour menacer la production alimentaire, réduire les approvisionnements en eau douce, entraîner des pertes de terres et d'infrastructures, et accroître l'incidence des maladies (Barnett et Adger, 2003). Il peut s'ensuivre des mouvements massifs de population; cette migration peut se faire pacifiquement, mais elle peut aussi donner naissance à des conflits.

Les causes d'un grand nombre de conflits sont très difficiles à isoler. On estime que les stress environnementaux en sont rarement la cause principale. Cependant, les stress environnementaux et les disettes qu'ils engendrent peuvent exacerber des conflits politiques, sociaux, économiques, ethniques, religieux ou territoriaux, ou des conflits nés autour des ressources ou des intérêts nationaux (voir Gleick, 1990; Lonergan, 1998).

Le nombre de conflits armés en cours dépassait la cinquantaine au début des années 1990, mais il n'était plus que de 30 en 2003 (Human Security Centre, 2005). Cette augmentation ainsi que la baisse qui l'a suivie sont entièrement le produit de guerres civiles, et ces dernières représentent plus de 95 p. 100 de tous les conflits armés. Une des principales raisons de la baisse du nombre de conflits armés est une augmentation spectaculaire des activités internationales destinées à les arrêter et à en éviter de nouveaux (Human Security Centre, 2005). Parmi ces activités figurent des missions de diplomatie préventive, des missions de maintien de la paix, des opérations de maintien de la paix et des sanctions de la part des Nations Unies et d'autres groupes (Ackermann, 2003; Human Security Centre, 2005). Le Canada a tr ès souvent participé à ces efforts.

Les impacts du changement climatique pourraient engendrer de nouveaux conflits ou aggraver des conflits d'origine non climatique, mais cette relation n'est pas claire. Des recherches empiriques confirment que l'appauvrissement de l'environnement cause de grands mouvements de population qui peuvent à leur tour déclencher des conflits (p. ex., Baechler, 1998). Les conflits armés qui en résultent sont généralement persistants, diffus et d'ordre infranational plutôt qu'international (Homer-Dixon, 1991; Baechler, 1998). Le Canada et les autres pays auraient tout int érêt à explorer les meilleures façons d'utiliser les politiques étrangères et les ressources du développement international pour atténuer le risque de conflits de ce genre en tenant compte du fait que le changement climatique pourrait constituer un facteur.

2.5 IMPLICATIONS POUR LA MIGRATION INTERNATIONALE EN DIRECTION DU CANADA

Le Canada a toujours été une destination de prédilection pour les migrants internationaux. L'immigration est régie par la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés de 2002 et par ses règlements d'application. La Loi établit une distinction nette entre les objectifs sociaux, culturels et économiques du programme d'immigration et les buts humanitaires du programme de protection des réfugiés. Au cours de la dernière décennie, le Canada a accueilli chaque année entre 175 000 et 250 000 immigrants, dont 22 000 à 33 000 réfugiés. En 2005, 32,0 p. 100 des réfugiés venaient de l'Afrique et du Moyen-Orient, 33,1 p. 100 de l'Asie et des pays du Pacifique, 21,3 p. 100 de l'Amérique du Sud et de l'Amérique centrale, et 11,2 p. 100 de l'Europe (Citoyenneté et Immigration Canada, 2006).

La migration, qu'elle se fasse du milieu rural au milieu urbain, entre régions urbaines dans un même pays ou entre les pays, est déterminée par une combinaison de facteurs de dissuasion liés à la provenance et de facteurs d'incitation liés à la destination (Castles et Miller, 1993). Les impacts négatifs du changement climatique vont continuer d'aggraver la dégradation de l'environnement et contribuer à des déplacements de population internes et externes (Stern, 2006). Des changements graduels, comme une baisse des rendements agricoles ou de l'approvisionnement en eau, déclenchent une migration parce que la région touchée devient moins attirante. Les gens sont alors attirés par des endroits où les possibilités sont meilleures, où vivent des parents et des amis, et où ils estiment qu'il y a tel ou tel avantage (Cragg et Kahn, 1997; Deane et Gutmann, 2003). Par le pass é, la migration causée par les impacts du changement climatique s'est effectuée dans une très large mesure à l'intérieur du même pays (Baechler, 1998), et il n'y a aucune raison de croire que cet état de choses va changer. La présence de parents et d'amis au sein de la communauté immigrante pourrait faire du Canada un choix intéressant pour certains migrants étrangers.

Aux termes du droit international, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les r éfugiés définit les réfugiés comme des personnes qui fuient leur pays par crainte de persécution d'ordre ethnique, religieux ou politique, ou pour échapper à des conflits, et qui ne peuvent pas compter sur la protection de leur propre gouvernement (Haut Commissariat des Nations Unies pour les r éfugiés, 2006). Il précise qu'une « utilisation exacte du terme » réfugié « implique le besoin d'une protection internationale » (Haut Commissariat des nations Unies pour les réfugiés, 1993, chapitre 1, p. 3 [traduction]). Le nombre total de réfugiés dans le monde était de l'ordre de 14 millions à la fin de 2004, dont environ 4,8 millions de réfugiés palestiniens et 9,2 millions de réfugiés dans d'autres pays qui préoccupent le Haut Commissariat (Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, 2005)Note de bas de page 1. Le nombre de réfugiés qui préoccupent le Haut Commissariat, qui était d'environ 12,1 millions de personnes à la fin de 2001, a baissé régulièrement depuis (Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, 2005). En Afrique, il y avait un peu plus de 3 millions de réfugiés, la plupart dans des pays limitrophes de ceux où sévissaient des conflits armés intérieurs.

El-Hinnawi (1985) a défini le terme « réfugié de l'environnement » comme désignant une personne contrainte à quitter son habitat traditionnel en raison d'une perturbation de l'environnement qui met en péril son existence ou touche gravement sa qualité de vie. Bien qu'utilisé dans la documentation sur le changement climatique, ce terme demeure controversé. Les personnes déplacées à la suite de changements environnementaux ont généralement besoin d'aide et non de protection, et c'est pourquoi elles ne répondent pas à la définition d'un réfugié. Il serait peut-être plus juste de parler de personnes déplacées en raison d'une dégradation de l'environnement.

Le tableau 3 présente une estimation récente du nombre de personnes déplacées en raison d'une dégradation de l'environnement ainsi que des projections qui tiennent compte des impacts du changement climatique. Ces estimations ne sont étayées que par une faible quantité de données empiriques (Black, 2001), mais il est largement admis que le changement environnemental contribue à la migration interne et internationale, et que le nombre de migrants pourrait être élevé. Selon les projections de Myers et Kent (1995), le nombre de « réfugiés de l'environnement » en 2050 atteindrait 150 millions, dont environ 100 millions en provenance de régions côtières basses, 50 millions de zones où l'agriculture est perturbée et 1 million d'États insulaires. Myers (2005) a depuis porté son estimation à un total de 200 millions de personnes. On croit que la plupart des personnes déplacées en raison de changements environnementaux se trouveront en Afrique et en Asie; elles seront g éographiquement éloignées du Canada et, par conséquent, moins susceptibles d'y émigrer. Plus près du Canada, la dégradation et la désertification des terres rurales sont d'importantes causes de migration à l'intérieur et en provenance du Mexique (Leighton, 1998).

TABLEAU 3 : Estimation du nombre de « réfugiés de l'environnement » (personnes déplacées en raison d'une dégradation de l'environnement).
Estimation du nombre de
réfugiés de l’environnement
Période
couverte par
l’estimation
Source 
Environ 10 millions  Annéees 1980 Jacobson (1988) 
Environ 64 millions  Annéees 1980 Lonergan (1998) 
Environ 15 millions  1990  Westing (1992) 
Jusqu'à 25 millions, dont 25 à 33 p.
100 proviennent de sources
internationales, le reste étant
généré à l'interne : 16 millions pour
l'Afrique, 6 millions pour la Chine et
2 millions pour le Mexique.
1990  Myers (1993) 
Environ 150 millions  2050  Myers and Kent (1995) 
Environ 200 millions  2050  Myers (2005) 
8,6 millions de personnes forcées à
migrer en raison d’une élévation de
1 m du niveau de la mer 
  Tol (2002) 

En rendant les conditions de vie difficiles, voire impossibles, dans une région, les impacts du changement climatique entraîneront des migrations internes et internationales (McLeman et Smit, 2005). Les régions rurales de pays pauvres éloignés du Canada seront probablement les plus touchées. Le risque que des « vagues de réfugiés de l'environnement » déferlent sur le Canada et viennent déstabiliser l'ordre national et les relations internationales est faible (Homer-Dixon, 1991). Toutefois, le changement climatique pourrait amener la communauté internationale à exercer des pressions sur le Canada pour qu'il accepte davantage d'immigrants et de réfugiés.Note de bas de page 2

2.6 EFFETS SUR LA SANTÉ

Les problèmes de santé qui se posent à l'étranger, notamment les variations de l'abondance et de la virulence des maladies dans des pays avec lesquels le Canada entretient des relations touristiques et commerciales importantes, ont des répercussions au Canada. D'autres questions d'ordre sanitaire, comme celles qui sont attribuables à l'augmentation du nombre et de la gravité des désastres naturels, entraînent une augmentation du nombre de demandes d'aide reçues par le Canada (voir la section 2.2).

Dans de nombreuses régions du monde, le paludisme, la dengue hémorragique, la malnutrition et les maladies diarrhéiques sont en croissance, et ce, en raison de plusieurs facteurs, dont le changement climatique. À partir de données compilées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), des chercheurs ont estimé que, jusqu'en 2004, le réchauffement climatique avait contribué chaque année à plus de 150 000 décès et à 5 millions de cas de maladies (Patz et al., 2005). D'après la même étude, ces chiffres devraient doubler d'ici 2030 sous l'effet du changement climatique et d'autres facteurs (p. ex,. répartition de la population, pollution de l'eau). Les plus grandes menaces sont la progression de la malnutrition et du paludisme en Afrique, l'accroissement du nombre de cas de diarrhée en Asie du Sud-Est et la multiplication des catastrophes naturelles en Amérique latine et dans les Caraïbes. Les sections suivantes donnent des précisions au sujet de quelques-uns de ces problèmes. Ce sont les pays les plus pauvres de la planète qui sont les plus vulnérables face à ces répercussions (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2007b). Ces tendances vont probablement exercer des pressions sur les programmes d'assistance technique et d'aide humanitaire du Canada.

Maladies

Certaines maladies, telles que le choléra, font suite à des vagues de chaleur, comme celles induites par les épisodes d'El Niño chauds en Amérique centrale et en Amérique du Sud; elles se propageraient probablement davantage dans un monde sujet au réchauffement. Certaines maladies tropicales et subtropicales transmises par les tiques, les insectes et les esp èces sauvages constituent une menace croissante pour le Canada dans un climat plus chaud (voir les chapitres régionaux dans le présent rapport). Les maladies à transmission vectorielle, dont le paludisme, la dengue et la maladie de Lyme (transmises par des tiques), pourraient étendre leurs aires de répartition en Amérique du Nord (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2001b). Jusqu'à maintenant, on est parvenu à éliminer presque totalement les maladies telles que le paludisme au Canada grâce à des programmes dynamiques de prévention, mais il faudra demeurer vigilant et continuer à offrir de l'aide si l'on veut réduire les impacts à l'étranger.

Les maladies diarrhéiques représentent un autre risque important pour la santé; elles provoquent des milliers de décès prématurés dans les pays pauvres où l'eau et les aliments sont mal traités et mal inspectés, en particulier en Afrique, en Asie du Sud-Est et dans l'est de la Méditerranée (Campbell-Lendrum et al., 2003). On estime qu'à l'échelle mondiale chaque degré Celsius de réchauffement augmente de 5 p. 100 le nombre de cas de diarrhée (Campbell-Lendrum et al., 2003).

Températures extrêmes

L'augmentation de la durée et de l'intensité des vagues de chaleur aura un effet sur l'incidence des maladies et sur la mortalit é liées à la chaleur. Les températures nocturnes élevées, qui ne permettent guère de répit à l'organisme, sont un élément important des vagues de chaleur. Selon une analyse effectuée à l'échelle planétaire, la fréquence annuelle des nuits chaudes a augmenté considérablement entre 1951 et 2003 sur plus de 70 p. 100 de la surface terrestre; la hausse du nombre de nuits chaudes par d écennie a été particulièrement marquée dans l'ouest de l'Afrique, en Eurasie, dans le nord de l'Amérique du Sud et dans l'ouest de l'Amérique du Nord (Alexander et al., 2006).

De toute l'histoire de l'Europe, la vague de chaleur d'août 2003 est l'événement climatique qui a eu de loin l'effet le plus considérable sur la mortalité, le nombre de décès supplémentaires étant passé de 27 000 à 40 000 (Kovats et Jendritzky, 2005). Les décès prématurés et les hospitalisations devraient devenir plus fréquents dans bien des régions, quoique l'on s'attende à une réduction du nombre de décès liés au froid intense dans les régions tempérées et subpolaires. Plusieurs villes du monde, dont certaines villes canadiennes, ont mis en place des mesures d'adaptation pour att énuer les effets des vagues de chaleur, notamment des avertissements et des services de pr éparation en cas d'urgence ainsi que des « toits verts » (végétalisés) sur les grands immeubles, afin de réduire l'effet d'îlot thermique urbain (voir les chapitres 5 et 6).

Sécurité alimentaire

Avec l'évolution du climat, les problèmes de santé et la mortalité attribuables à l'intensification de la sécheresse et à la famine augmentent dans certaines régions et diminuent dans d'autres. Malgré la complexité des rapports qui existent entre la productivité des cultures et le climat (Easterling et al., 2007), la plupart des études prévoient une diminution des rendements agricoles aux faibles latitudes, même s'il ne s'agit que d'une très faible augmentation des températures moyennes (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, 2007b). Certaines études soulèvent des préoccupations. Celle de Peng et al. (2004), où l'on a eu recours à des expériences contrôlées, a fait état d'une réduction de 10 p. 100 de la production de riz pour chaque hausse d'un degré Celsius des températures nocturnes. Les répercussions sur la santé du manque d'approvisionnements alimentaires adéquats sont particulièrement inquiétantes en Afrique. En Afrique, le plongeon de l'Indice a commencé vers 1970, ce qui coïncide grosso modo avec le début du réchauffement rapide de la température à l'échelle planétaire. Cette tendance à la baisse de la production sous l'effet du changement climatique va probablement se poursuivre, entra înant une augmentation de la demande de production alimentaire, et certains pays, dont le Canada, seront appel és à combler le manque à produire. La majorité des gens qui risquent encore davantage de souffrir de la faim à cause du changement climatique vivent en Afrique (Parry et al., 1999).

Inondations

Les inondations côtières et intérieures ont à la fois des effets immédiats sur la santé, causant parfois des blessures et des pertes de vie, et des effets à plus long terme qui découlent de la contamination de l'eau et des aliments. Pour réduire ces impacts, il est donc essentiel d'assurer un approvisionnement en eau propre d ès que possible après le désastre.

En raison des effets combinés de l'élévation du niveau marin, de la croissance rapide de la population partout en milieu c ôtier, de l'augmentation de la violence des tempêtes hivernales et tropicales, et de l'intensité des ondes de tempête, de plus en plus de gens seront exposés à des inondations côtières. Les régions qui seront probablement les plus touchées par ce problème sont les petites îles et les mégadeltas asiatiques, comme ceux du Ganges-Brahmaputra et du Zhujiang (Adger et al., 2007). Les zones côtières basses (ZCB; < 10 m au-dessus du niveau moyen de la mer) abritent environ 10 p. 100 de la population mondiale, alors qu'elles représentent à peine 2,2 p. 100 de la superficie totale des terres (McGranahan et al., 2006). C'est l'Asie qui compte de loin la population la plus nombreuse dans les ZCB, et, dans 19 des 215 pays étudiés par McGranahan et al. (2006), plus de 50 p. 100 de la population y habite (voir également McGranahan et al., 2007). Toutes proportions gardées, les effets les plus considérables se feront probablement sentir sur les petits États insulaires occupant des basses terres dans les Caraïbes, dans le sud-ouest du Pacifique et dans l'océan Indien.

Le sixième de la population mondiale vit dans des régions sujettes à des inondations attribuables en partie à la fonte de la neige. Dans ces régions, le changement climatique pourrait avoir pour effet de réduire les pointes de crue moyennes (Barnett et al., 2005). Néanmoins, dans les régions sujettes aux cyclones tropicaux (p. ex., l'Amérique centrale, les Caraïbes et le sud-ouest du Pacifique), les augmentations constatées de la gravité et de la durée de ces événements (Webster et al., 2005) entraînent un accroissement du nombre d'inondations et de glissements de terrain. Il a de plus été démontré que les pluies intenses ont augmenté en fréquence et en intensité dans de nombreuses régions du monde, notamment dans l'est des États-Unis et le sud-est du Canada, le nord du Mexique, l'est de l'Amérique du Sud, le sud de l'Afrique, l'Europe, l'Inde et l'est de l'Asie (Groisman et al., 2005). Ces pluies peuvent causer des crues subites, souvent trop brutales pour qu'on ait le temps d' émettre des avertissements et de protéger les personnes et les biens et, de plus en plus fréquemment, des inondations urbaines imputables à une surcharge des réseaux d'évacuation. Les pluies très intenses, de plus en plus fréquentes sur une grande surface de la planète, entraînent souvent Escherichia coli et d'autres matières contaminantes de l'eau potable vers les puits ou les eaux de surface. Aux États-Unis, on estime que 68 p. 100 de toutes les crises sanitaires liées à la contamination de l'eau sont survenues après des épisodes de fortes pluies (Patz, 2001).

Implications possibles pour le Canada

Dans la plupart des cas, il est possible pour le Canada de réduire les répercussions du changement climatique sur la santé et la mortalité à l'étranger en adoptant des mesures d'adaptation aussi bien sur son territoire que sur la scène internationale. Il a déjà commencé à le faire (voir la section 5).

Le Canada et d'autres pays développés pourraient contribuer à réduire davantage la vulnérabilité sur le plan de la santé dans d'autres pays par l'intermédiaire de programmes d'aide destinés à :

  • renforcer les services de santé publique dans les régions touchées;
  • réduire la présence d'eaux stagnantes, où prolifèrent les moustiques porteurs de la dengue et du paludisme;
  • améliorer les systèmes de traitement de l'eau;
  • améliorer les systèmes d'alerte aux inondations côtières et riveraines, aux vagues de chaleur et à la sécheresse imminente.

Sur son territoire, le Canada pourrait :

  • tenir compte, dans ses politiques d'immigration, des personnes déplacées par des problèmes de santé publique et des désastres naturels;
  • améliorer les programmes de surveillance de la progression des maladies liées au climat;
  • améliorer les contrôles sanitaires aux frontières pour tenir compte des maladies infectieuses sensibles au climat.

2.7 EFFETS SUR LE TOURISME

Le tourisme est, dans le monde, un des secteurs économiques les plus importants et connaissant la croissance la plus rapide. En 2004, il repr ésentait 1,5 à 2,0 p. 100 du PIB du Canada (Commission canadienne du tourisme, 2005; Organisation mondiale du tourisme, 2005; Statistique Canada, 2006). Plus de 19 millions de touristes (visites de plus de 24 heures) sont venus au Canada, dont plus de 15 millions en provenance des États-Unis (Commission canadienne du tourisme, 2005; Organisation mondiale du tourisme, 2005). En outre, il y a eu 19,7 millions de visites d'une journée. Environ 55 p. 100 des visites de touristes étaient consacrées aux loisirs et aux vacances (Organisation mondiale du tourisme, 2005). Les touristes étrangers passaient en moyenne chacun 6,4 nuits au Canada et comptaient pour environ 30 p. 100 dans le total des nuit ées dans des établissements d'hébergement (Organisation mondiale du tourisme, 2005). Outre les voyages sur le territoire national, 19,6 millions de Canadiens sont all és à l'étranger, surtout aux États-Unis, pour des séjours de plus de 24 heures. Le tourisme étranger au Canada culmine en été, alors que les Canadiens vont à l'étranger en hiver (Commission canadienne du tourisme, 2005).

Bien qu'il soit évident que le tourisme est lié au climat, la plus grande partie des études portant sur les impacts du climat et du changement climatique sur le tourisme sont post érieures à 2000 (Scott et al., 2005). Hamilton et al. (2005) dégagent trois axes principaux de ces ouvrages :

  • les études qui établissent des modèles statistiques du comportement de certains groupes de touristes en fonction des conditions m étéorologiques et du climat;
  • les études sur l'avenir de certaines destinations touristiques en fonction d'un climat en évolution;
  • les études qui tentent de définir des indicateurs de l'attrait de certaines conditions météorologiques pour les touristes.

Les études de la première catégorie concernent presque exclusivement les choix de vacances de temps chaud des Europ éens et l'importance des conditions météorologiques et autres agréments dans le choix des destinations fait par les Britanniques, les Hollandais, les Allemands, les Italiens et autres touristes européens (Agnew et Palutikof, 2001; Maddison, 2001; Lise et Tol, 2002). Aucune étude consultée au sujet des destinations privilégiées des touristes canadiens ne fait état des conditions météorologiques ou climatiques comme étant des facteurs ayant joué dans la détermination de ces choix. Cependant, les vacances d'hiver à Hawaii, en Arizona, en Floride, dans les Caraïbes et au Mexique sont de toute évidence motivées par la recherche de conditions plus chaudes.

Au cours des 20 dernières années, de nombreuses études ont porté sur les incidences possibles du changement climatique sur les destinations touristiques au Canada, études axées sur les divers types d'activités au grand air pratiquées par les touristes dans la plus grande partie du pays (Scott et al., 2004; Jones et Scott, 2006). Ces études révèlent que le ski et autres loisirs d'hiver seront touchés de façon défavorable, malgré l'augmentation de la fabrication de neige artificielle. La longueur et la qualité de la saison touristique d'été devraient s'améliorer dans la plupart des régions, mais il faudra probablement procéder à des ajustements, comme une meilleure gestion de l'eau pour les terrains de golf. Dans certains régions, l'adaptation sera liée à la baisse des débits et des niveaux d'eau pour les activités aquatiques. Les impacts sur le tourisme et l'adaptation de ce secteur sont aussi abordés plus en détail dans les chapitres régionaux.

Bien que ces études fournissent d'importantes perspectives quant aux impacts du changement climatique sur une destination donn ée, le flux de touristes dépendra des incidences du changement climatique et des modifications environnementales qui l'accompagnent sur l'attrait de cette destination par rapport à ses concurrentes.

Les études portant sur le troisième axe postulent que le comportement de voyage est régi par deux ensembles de facteurs : un qui motive une personne à envisager de voyager et l'autre qui l'attire vers une destination en particulier (de Freitas et al., 2004; Scott et al., 2004; Amelung et Viner, 2006). Ces analyses se servent de divers indicateurs directs, comme la temp érature et l'humidité, ou indirects, comme la présence de plages, pour évaluer l'attrait de certaines conditions météorologiques pour les touristes.

Un modèle de simulation du tourisme mondial projetant les arrivées et départs pour 207 pays sur la base de la population, du revenu par personne et du climat révèle que la croissance du tourisme est régie par les augmentations de la population et du revenu et qu'elle est donc plus importante en Asie et en Afrique qu'en Europe et en Amérique du Nord (Hamilton et al., 2005). Le tourisme mondial augment de 3,2 p. 100 par an entre 1995 et 2075 dans le cas de référence.

Le changement climatique réoriente le tourisme vers les pôles et des basses terres vers les terres plus hautes. À mesure que les pays plus proches des pôles deviennent plus attrayants pour leurs propres résidants, ils tendent à générer moins de tourisme vers l'étranger (Hamilton et al., 2005). En plus des températures plus élevées, les pays plus proches de l'équateur deviennent moins attirants à cause de la perte de plages et de récifs coralliens, et des dégâts infligés par des tempêtes tropicales plus intenses (Loftus, 2005).

Jusqu'en 2025, le changement climatique devrait profiter davantage au tourisme au Canada que dans tout autre pays (Hamilton et al., 2005). Il ferait croître la part canadienne des arrivées de l'étranger (c.-à-d., plus de touristes venant au Canada) et baisser la part canadienne des départs vers l'étranger (c.-à-d., moins de Canadiens voyageant à l'étranger). Les Canadiens prendraient en effet plus de vacances sur le territoire national, et les d éplacements intérieurs croîtraient par rapport aux déplacements internationaux (Hamilton et al., 2005). Les auteurs font cependant une mise en garde : le modèle est très simplifié, avec une représentation rudimentaire du changement climatique, de sorte qu'il faudrait accorder plus d'attention aux résultats qualitatifs. De plus, le modèle laisse de côté un certain nombre de variables fort probablement susceptibles d'avoir un effet sur les flux de touristes (Gössling et Hall, 2006).

En résumé, le tourisme estival au Canada bénéficiera probablement du changement climatique, mais certaines activités pourront devoir s'adapter. Cette situation attirera davantage de touristes étrangers et gardera plus de Canadiens sur le territoire national. Le tourisme d'hiver au Canada pourrait souffrir malgré les mesures d'adaptation. Par contre, avec des hivers plus doux, il se pourrait que moins de Canadiens choisissent des destinations de climat chaud.

 

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